Sebastien Grandjean : «Une mission à accomplir »

Après une élimination sans appel lors de la double confrontation en qualifications de Ligue des Champions, le CS Fola Esch, tenant du titre en BGL Ligue, entame ce soir sa campagne en 2e tour qualificatif pour la Conférence League. L’heure pour Sebastien Grandjean de dresser un petit bilan, et dévoiler son état d’esprit avant ce match aller. Entretien :

Quels sont les enseignements à tirer de la double confrontation précédente contre le Lincoln Red Imps ?

Premièrement, que cela n’était pas un adversaire aussi facile que ce que les gens pensaient. Ensuite, tout simplement que nous n’étions pas prêts. Pas prêts mentalement, pas prêts avec cette nouvelle saison et nouvelle équipe. On a des bases qui n’ont pas été assez solides pour tenir le coup. L’intégration des nouveaux prend elle aussi du temps, ce qui est absolument logique. Il y a des automatismes à mettre en place. Nous étions l’an passé une équipe résolument offensive dans laquelle les choses tournaient bien, avec des certitudes et aujourd’hui, on doit les retrouver et les retravailler. C’est pour cela que ces deux matchs ont été difficiles. On a eu affaire à une équipe qui était très bien en place, nous a attendu, a su planter des contres meurtriers. Encore hier, ils menaient 1-0 contre Cluj avant de finalement perdre, mais ça veut bien dire quelque chose sur le niveau de cette équipe. On peut aussi dire donc que l’adversaire n’était pas contrairement à la vision du grand public une partie de plaisir. Cela avait tout d’un piège et on est tombé dedans pour plein de raisons.

Précisément, votre tirage avait été unanimement considéré comme clément avec un adversaire sur le papier modeste. Est-ce que ça n’a pas pu jouer en votre défaveur ? N’a t-on pas assisté à un surplus de confiance ? Les joueurs ont-ils été surpris de la qualité de Lincoln Red Imps ?

Evidemment. C’est inévitable. Par leur agressivité positive, par leur roublardise, par leur rigueur, ils ont impressionné. Ils étaient très bien en place, ils nous ont attendu, ils nous ont bien bloqué avec deux lignes de quatre. Et au final, on a fini par s’écrouler. D’autant au match aller on a été costaud, au retour avec le troisième but et l’expulsion, on a lâché. Beaucoup de choses ont fait que malheureusement on s’est planté sur cette confrontation mais c’est comme ça. On continue.

Sur les deux matchs, on a pu remarquer toujours ce désir d’aller vers de l’avant, de proposer un football offensif, mais contrairement à la saison précédente, parfois au détriment de l’équilibre global, avec une défense plusieurs fois esseulée. Est-ce que c’est quelque chose qui est dû aux changements de joueurs, à une décompression vis-à-vis de l’an passé ? À quoi attribuez-vous cela ?

C’est ces questions-là qu’on s’est posé et on en arrive au fait que la saison dernière, ça nous réussissait, on avait un bel équilibre, de vrais automatismes, une grande confiance qui permettait de réagir dans des situations difficiles. Mais il ne faut pas oublier qu’on a perdu nos leaders techniques offensifs, ce qui a pu provoquer chez ceux qui sont restés quelques inquiétudes sur le futur. Ce sont des choses dont on a parlé directement après Gibraltar. Il fallait appuyer la où ça fait mal, ne pas éviter les gros sujets. Il était important de rétablir la confiance dans le groupe entre ceux qui étaient présent la saison dernière mais aussi les nouveaux, qui sont arrivés avec une mentalité formidable. Mais ces choses prennent du temps. Ces matchs sont peut-être venus trop rapidement, et on n’a pas su faire. C’est une remise en question globale, du staff aussi. Nous sommes tous responsables, moi y compris.

Vous abordez maintenant un match de Conférence League. Est-il dur de trouver la motivation dans la troisième compétition européenne après avoir participé dans la première ?

Est-ce qu’un club Luxembourgeois peut se permettre de snober une Coupe d’Europe, peu importe son titre ? Je pense que poser la question c’est y répondre. Pour nous, la Conférence League c’est notre Champion’s League. Il y a une compétition européenne, le bonheur d’y être, la fierté de défendre le football au Grand-Duchél. J’ai bien ça dans la tête et le message est passé. On a une mission à accomplir et on doit montrer belle figure dans n’importe quelle compétition européenne. Son nom, ça ne change rien pour nous. La seule chose qui change c’est la dotation financière. Peut-on prendre de haut le champion Biélorusse, qui a terminé devant le Bate Borisov ? Non. Il faut venir avec de l’humilité et savourer la chance de jouer un adversaire au nom certes peu clinquant, mais extrêmement solide.

Vous avez du vous déplacer à Gibraltar, cette fois-ci vous allez en Hongrie. Ces déplacements conséquents vous inquiètent-ils ?

Disons que quand on est parti à Gibraltar, c’était le lendemain de la finale de l’Euro, que tout le monde avait suivi jusque minuit passé. On devait être à 4heures du matin a l’aéroport avec trois heures et demie de sommeil. Ce n’est pas une excuse mais la vérité. Cette fois-ci on est parti plus tard, à 10h, mais on n'est toujours pas arrivé encore (NDLR : l'entretien a été réalisé mercredi 21 juillet à 15h). Ce sont des choses avec lesquelles il faut vivre. On n’est pas le Real Madrid. On essaye de s’organiser et gérer cette fatigué engrangée par un tel voyage.

Avec le résultat négatif face à Lincoln Red, peut-on assister à une remise en question de certains de vos principes de jeu qui semblent particulièrement ancrés ?

Justement, c’est ancré, donc il ne va pas y avoir de grosse remise en question. Mais on doit retravailler les bases. C’est ce qu’on a fait depuis cette double confrontation, avec en particulier les replacements, les courses défensives, le repositionnement en bloc équipe, reprendre les bonnes distances et repères qui sont capitaux. Apporter un peu de rigueur pour rassurer les joueurs, les faire retravailler ensemble et retrouver la confiance. C’est important de le faire et de ne plus planer. Le titre c’était l’an passé. Nous sommes maintenant dans un nouveau championnat, et si on le joue en planant on risque d’avoir de sacrées déconvenues. On doit être humbles et pragmatiques, et repartir par les bases.

Ces premières rencontres officielles vous-ont elles permis d’avoir un onze titulaire plus défini ?

Il y a encore beaucoup de… je ne veux pas dire interrogations, mais nous avons pas mal de nouveaux joueurs en qui on croit mais qu’il faut polir. On a repris depuis quatre semaines, avec trois matchs amicaux et la Champions League. On ne peut pas tout intégrer aussi vite. C’est la différence entre un club qui joue la Coupe d’Europe et celui qui n’y participe pas. Ce dernier a plus de temps pour intégrer les nouveaux éléments, a le temps de voir. Nous on doit être tout de suite dans le vrai. C’est là ou est notre souci : le manque de temps.

N’est-ce pas un peu difficile de commencer la saison – avec une préparation qui n’est pas complète – par des matchs phares européens, qui peuvent aussi jouer un gros rôle sur le moral du groupe au moment de début le championnat ?

En effet c’est compliqué. C’est un peu la rançon de la gloire. Chaque club Luxembourgeois se retrouve dans ces conditions là. Dans les quatre clubs qui participent à l’Europe, à part le Racing et surtout Dudelange qui a renforcé ces bases en allant chercher des garçons confirmés, il y a une part d’inconnu. Nous, nous avons fait le choix de recruter des joueurs où il y a de l’avenir, du potentiel, mais qu’il faut travailler. Ce ne sont pas des garçons qui arrivent et ça part tout seul, hormis peut-être Grisez qui lui a de l’expérience. Mais les autres sont encore une fois, à potentiel. Tout ça, mis l’un dans l’autre, n’amène pas à des excuses mais à la réalité. Dans ces conditions là, évidemment qu’on aurait aimé avoir plus de temps mais c’est comme ça. Ca ne m’intéresse pas de vivre dans le passé, ce qui me plait c’est l’avenir. C’est pour cela qu’après Gibraltar on a fait un gros point pour repartir du bon pied. Et on verra si le match de demain nous montrera de la consistance ou une performance prometteuse.

Précisément : cette politique de recrutement, qui consiste à repartir chaque saison avec une grande part d’inconnue ne peut-elle pas créer une certaine forme de saturation mentale chez vous ?

J’ai un peu de mal à répondre cette question, car si je me la posais, cela signifierait que je vais à l’encontre de la politique du club. Si je suis dedans, c’est que je suis derrière et d’accord avec elle. C’est ainsi que les choses fonctionnent ici. Un entraîneur ou un joueur n’est pas obligé de rester, mais s’il le fait, c’est qu’il est d’accord avec ce qui se fait. Donc chacun doit rester à sa place. Les joueurs jouent, les entraîneurs entraînent, et les dirigeants dirigent. Ça, c’est ma vision.

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