Pour ceux qui ne vous connaissent pas, pourriez-vous nous résumer votre parcours et votre rôle au sein de la Fédération luxembourgeoise de rugby (environ 900 licenciés) ?
J’ai 39 ans, je suis né à Marseille et j’ai commencé ma carrière de joueur en Provence. J’ai ensuite été conseiller technique pour la Fédération française de rugby de 2007 à 2011, puis directeur technique à Metz de 2011 à 2015. Je suis également formateur pour la Fédération internationale de rugby. Mon rôle en tant que DTN (Directeur technique national) depuis six ans est de manager et de définir toute la politique sportive de la Fédération, du pôle de haut niveau (qui concerne toutes les équipes nationales, hommes et femmes, toutes les catégories d’âges, le centre de formation fédéral, le pôle développement (pour faire découvrir le rugby au public ou aux entreprises), le pôle santé (qui s’est malgré nous beaucoup développé par la force des choses les deux dernières années) et le pôle central de gouvernance. Tout cela pour le rugby à XV et à 7 (désormais discipline olympique). Pour résumer, je fais le lien entre tout l’aspect politique et gouvernance et le sportif.
Le 27 novembre prochain, le XV luxembourgeois va vivre un grand moment avec son premier match dans le nouveau stade, contre la République tchèque. 2000 spectateurs environ sont attendus. Qu’est-ce que cela représente pour le staff et les joueurs ?
Il s’agit d’un gros rendez-vous, d’une grosse attente pour tout le monde. L’outil a l’air sympathique… vraiment la structure est magnifique. On espère y faire honneur dès samedi. J’espère juste que les joueurs ne se mettront pas trop la pression. Théoriquement, la République tchèque est la meilleure équipe de la poule, mais avec le Covid, on ne sait pas trop où ils en sont vraiment. On espère être à la hauteur en tout cas.
Comment vous êtes-vous retrouvé DTN de la Fédération luxembourgeoise ?
Par un concours de circonstances. J’avais des contacts avec les équipes luxembourgeoises, notamment à travers des jeunes que j’encadrais de l’autre côté de la frontière. Un entraîneur néo-zélandais était sur le départ, on m’a proposé de postuler, je l’ai fait sans trop y croire. Je ne pensais pas un jour aller manager ailleurs que chez moi, à l’étranger, alors au Luxembourg encore moins… Et voilà, je suis là, je viens même de déménager et de m’installer ici.
Aujourd’hui, quels sont les profils des joueurs qui composent la sélection ?
Nous sommes un petit pays, avec cinq clubs, nous avons donc des profils très hétérogènes. Les deux tiers d’entre eux évoluent dans des clubs étrangers, en France, en Angleterre, en Belgique, en Ecosse, en Suisse, en Autriche, en Irlande, aux Pays-bas. L’avantage est d’avoir des mecs avec une expérience riche, variée, qui se nourrissent de cultures différentes. L’inconvénient est que c’est très compliqué de rassembler tout le monde.
A quelle fréquence parvenez-vous à les réunir pour qu’ils s’entraînent ensemble ?
Il s’agit du point le plus contraignant aujourd’hui, même s’il existe une vraie volonté de travailler ensemble et de se retrouver le plus possible. Un nouveau staff est en place depuis un an, il faut aussi que les choses se mettent en place. Sur la saison, on a prévu trois stages de trois jours dans le cadre des quatre matchs internationaux de la Rugby Europe conférence I Nord. On en a quatre contre la Suède, la République tchèque, la Lettonie et la Hongrie, et l’équipe passe du coup quatre jours pleins ensemble à chaque fois. Cela demande un gros travail de préparation en amont afin d’optimiser les séances d’entraînements collectifs qui se déroulent, du coup, sur un temps très réduit. Ces conditions nous obligent à avoir beaucoup de méthodologie.
Quels sont les objectifs pour l’équipe première à moyen et long terme ?
L’objectif à long terme est d’intégrer le top 50 des équipes mondiales dans les quatre ans, en remportant notre poule notamment. Nous sommes aujourd’hui au 56e rang. En 2023, nous participons aux Jeux olympiques des petits Etats à Malte et nous espérons ramener une médaille en rugby à 7. A court terme, le but principal est d’être impactés le moins possible par les effets post crise sanitaire. A l’heure actuelle, nous avons dix blessés, et des graves, avec des ruptures des ligaments croisés, dues en partie à cette cassure de rythme pendant les confinements et à la reprise qui s’en est suivie. Nous souhaitons surtout gérer au mieux ce redémarrage et être capables de relancer la machine.
Quelles sont les principaux obstacles rencontrés par l’équipe première, en plus de ceux déjà évoqués ?
Le troisième obstacle de taille est que nous sommes orphelins d’un camp de base. Le nouveau stade est un super outil, mais il nous manque encore un vrai centre d’entraînement. Je sais que c’est compliqué et que ça représente un coût, et je ne veux pas paraître arrogant. Mais il s’agit d’une réelle urgence pour nous d’avoir un jour ce terrain rien qu’à nous. Aujourd’hui, on se prépare essentiellement sur des terrains que des clubs nous mettent à disposition. Là, avant le match de la République tchèque, on va devoir s’entraîner sur trois terrains différents en trois jours. Ce n’est pas très confortable.
Vous misez beaucoup sur la formation. Où en êtes-vous et quelles sont les marges de progression ?
C’est en effet un point fort de notre stratégie avec, en plus, les programmes de formations des entraîneurs avec la fédération internationale de rugby. On fait également pareil avec les arbitres et les bénévoles. Chez les jeunes, nous avons environ trente joueurs de 14 à 18 ans qui font partie du programme Luxembourg Rugby Academy, qui leur permet de s’entraîner jusqu’à six fois par semaine en plus de séances avec leurs clubs. Il s’agit d’un véritable double projet basé à la fois sur la réussite sportive et scolaire. Notre volonté est de préparer les jeunes générations au niveau international. Nos U18, U16 et U14 ont un entraînement mensuel, on leur trouve des compétitions avec du niveau, et ils bénéficient des mêmes modèles d’organisation que les seniors. C’est d’ailleurs une grosse partie de mon travail, de préparer la suite, l’avenir, et de créer un vivier de joueurs de niveau international, notamment pour atteindre cet objectif de Top 50.
Quels sont les meilleurs leviers pour amener les Luxembourgeois vers le rugby, que ce soit du côté des licenciés ou des spectateurs ?
Le meilleur levier est de se faire connaître, d’être plus présents dans la communication. Nous devons aussi être attractifs par le jeu et le spectacles proposés. Nous devons donner du plaisir aux supporters. Nous devons jouer, prendre des risques, nous lâcher, c’est là que se trouve la bonne recette selon moi.
Luxembourg-République tchèque, samedi 27 novembre à 18h, au stade de Luxembourg.
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