
Celui qui est devenu le président des arbitres il y a moins d’un an revient sur les dernières mesures mises en place et les projets futurs, dans un monde du football où la pression n’a jamais semblé aussi grande sur l’homme en noir. Entretien avec Alex Krüger, membre du conseil d’administration de la FLF et ancien arbitre.
DRIBBLE! : La présence de plusieurs anciens arbitres au sein du board de la fédération permet-elle d’avancer plus vite sur certains sujets ?
Alex KRÜGER : Je pense que ça ne peut qu’être positif effectivement, mais même si j’étais seul, je vois que tout le monde dans le conseil soutient l’arbitrage. Je n’ai jamais de souci à faire valider des devis pour nos nouvelles plateformes puisque tout le monde soutient ces initiatives. C’est naturellement mieux d’être plusieurs, mais tout se passe parfaitement.
Comment ces plateformes permettent d’améliorer la situation de l’arbitrage ?
Pour commencer, nous avons un outil qui nous permet d’avoir un véritable suivi au niveau des arbitres. On voit tout dedans : si un arbitre a eu des soucis avec un club, on peut lui éviter d’arbitrer l’équipe en question pendant un certain temps. On peut également voir les distances afin de réduire les coûts de kilométrage, l’affiliation des arbitres à leur club… Et d’ici février prochain, tout devrait être en ordre pour que le paiement des arbitres soit fait via la plateforme, et non plus en cash.
Ça a été un gros travail de mise en place, mais désormais, on va pouvoir en profiter pleinement. Ensuite, RefPal, qui est une plateforme qui permet de former les arbitres sur certaines situations de jeu afin de les faire progresser. Chaque week-end, on choisit des matchs et on extrait une vingtaine de situations qui peuvent prêter à débat. Les arbitres ont ensuite quelques jours pour nous donner leur vision concernant ces situations et on donne notre avis derrière, afin de leur permettre de détecter leurs faiblesses et les aider à s’améliorer par la suite. Après une ou deux années, je pense qu’on aura une ligne plus cohérente en BGL Ligue et en Promotion d’Honneur.
L’arrivée de la VAR est-elle réaliste à court terme au pays ?
Il faudra sûrement regarder après le congrès de la FLF pour relancer les discussions concernant ce sujet-là, mais je ne pense pas que les clubs soient prêts à payer pour la VAR. En revanche, l’assistance video referee, portée par un projet appelé « Football Video Support », est un système alternatif qui pourrait être implémenté. Cela coûterait entre 200 et 300 euros par match.
Je ne sais pas si les clubs de BGL Ligue seraient tous enclins à payer ça à chaque fois, la fédération ne pouvant pas payer pour tout le monde sur ce sujet. Il faut avoir les installations nécessaires, peut-être un arbitre supplémentaire donc ce n’est pas simple. Mais le mode de fonctionnement permettrait l’utilisation d’un laptop pour revoir les images filmées par les caméras VEO et rejuger certaines situations que les bancs jugeraient contestables. Chaque entraîneur disposerait ainsi de deux challenges pour faire en sorte que l’arbitre aille revoir les images. Si l’entraîneur a raison, il conserverait ses challenges.
On a vu l’arrivée d’un quatrième arbitre en BGL Ligue et a contrario, toujours un seul arbitre chez les femmes. Est-ce un sujet qui vous préoccupe ?
Je pense que le souci vient du problème de financement. Je ne sais pas exactement si tous les clubs peuvent payer trois arbitres également pour les matchs des femmes. Sur les grosses rencontres chez les dames, on met trois arbitres. Il faudrait faire une enquête auprès des clubs concernés pour savoir s’ils seraient prêts à débloquer le budget nécessaire pour avoir ces trois arbitres. C’est un sujet délicat.
EXERGUE : « On a de la chance chez nous, les arbitres sont plutôt respectés. »
Comment se porte l’attractivité de l’arbitrage ? On sait que le pays est en pénurie… Les jeunes veulent encore être arbitres ?
Dans la nouvelle « promotion », on a eu 20 arbitres qui, pour les plus jeunes, ont 14 ans. On a malheureusement encore eu un problème il y a peu avec une jeune arbitre de 14 ans qui a été agressée après un match. On essaie vraiment de parler avec la commission des entraîneurs pour les sensibiliser sur ces sujets, afin que les arbitres puissent faire leur travail dans les meilleures conditions. On veut également renforcer le système de mentoring, qui vise à aider les jeunes arbitres.
Pour cela, un arbitre plus expérimenté vient arbitrer avec le jeune en tandem, afin que le plus inexpérimenté ressente un peu moins de pression lorsqu’il siffle durant la rencontre. On essaie donc de mettre en place ce genre de mesures afin de continuer à attirer les plus jeunes vers l’arbitrage. On est aussi en train de faire une réforme des statuts pour que les arbitres puissent continuer de jouer également à côté jusqu’à un âge plus avancé, car à cause des règlements actuels, les jeunes doivent faire un choix entre jouer et arbitrer, ce qui engendre une perte d’arbitres.
La vision de l’arbitre évolue-t-elle dans le bon sens ? On se rappelle notamment de la canette que vous aviez reçue il y a 9 ans et qui vous avait valu quelques jours d’arrêt…
Pour être honnête, c’est compliqué. On dit souvent que le football est le reflet de la société, et notre société est de plus en plus difficile. Malgré tout ça, je pense que nous sommes encore dans un pays où on a de la chance et où les agressions restent rares. Ce qu’on va avoir le plus souvent, ce sont des insultes ou menaces verbales. Si on a cinq agressions par an, c’est beaucoup. C’est en ce sens que je dis qu’on a de la chance, car selon moi, les arbitres sont quand même plutôt respectés.
Comment sensibiliser au rôle de l’arbitre et aux difficultés qu’il implique ?
On est en train de regarder comment on peut faire passer le message, notamment via les réseaux sociaux à l’aide de spots vidéos. Je ne sais pas si cela fonctionnera, mais on va essayer dans les prochains mois.
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