Sarah de Nutte et Ni Xia Lian : complicité totale

Depuis plus de dix ans, Sarah De Nutte et Ni Xia Lian font la paire lors des compétitions en double sous le drapeau luxembourgeois. Une collaboration de longue date qui s’est transformée en consécration lorsque le double a atteint le troisième rang mondial et premier européen. Les deux joueuses, complices, se sont confiées sur les secrets de cette réussite.

Vous souvenez-vous de votre premier match ensemble ?

(Elles réfléchissent.)

Sarah : C’était à Rotterdam, je crois.

Ni : En 2010 ? 2011 ?

Sarah : Oui, peut-être… Ou en Russie ? Je ne sais plus exactement… Je me souviens que dans la compétition, tout le monde était dans le top 100, et moi j’étais aux alentours de la 400e place… Mon classement était affiché sur mon maillot, dans le dos, j’étais très gênée ! (Rires) Mais j’avais une excellente partenaire de double. On a fini par perdre 4-2 contre les championnes d’Europe.

Ni : Tu avais quoi, 18 ans ?

Sarah : Oui, je pense… Peut-être 19, mais j’étais très jeune. Une autre époque…

Vous avez joué beaucoup de compétitions ensemble depuis. Quand vous êtes-vous rendu compte que vous aviez ce très grand potentiel ?

Ni : Je dirais aux Championnats d’Europe, lorsque nous sommes passées très près de la médaille…

Sarah : En 2013, nous avons fait notre premier quart de finale dans un Championnat d’Europe, à Vienne. C’était une surprise, car nous avions dû énormément batailler pour en arriver là, mais nous avions déjà des résultats intéressants.

Ni : Nous n’avions pas de ranking, Sarah était encore très jeune…. On s’est dit qu’on était fortes, mais on n’aurait jamais pu imaginer que l’on serait si fortes ! (Rires)

La progression a-t-elle eu lieu étape par étape, ou y a-t-il eu un bond soudain dans la qualité de votre jeu ?

Ni : Je pense que tout cela s’est fait proportionnellement au développement et à la progression de Sarah. Plus elle s’améliorait, plus cela devenait faisable.

Sarah : Xia Lian a toujours été forte. Quant à moi, je me suis en effet améliorée au fil des années.

Ni : Je me suis sentie plus en paix avec le temps, en voyant son niveau grandir.

Sarah : Tout reposait sur elle avant. Aujourd’hui, on peut bien plus compter l’une sur l’autre.

Ni : J’ai commencé à pouvoir prendre moins de risques, à lui faire confiance, à lui dire « Vas-y, vas-y ! » Avoir un jeu plus assuré, être plus en paix, cela a fait une énorme différence.

Au vu des résultats aujourd’hui, vous fixez-vous des objectifs particuliers au moment de commencer ?

Sarah : On ne se dit pas « Il faut une médaille. » Évidemment, on l’espère, mais on essaye de prendre les matchs les uns après les autres.

Ni : Il faut une constance, une solidité technique et évidemment mentale. Par ailleurs, le tirage joue toujours un grand rôle, donc on ne peut que prendre les matchs les uns après les autres. Et nous avons maintenant confiance en notre jeu, ce qui fait une énorme différence.

Quel est le plus beau souvenir d’un résultat en compétition pour vous ?

Sarah : Pour moi, c’est Houston. La fin de match était très drôle. La rencontre était tellement serrée, et on perdait 9-2 dans le dernier set… On revient à 9-8, et elles se procurent deux balles de match à 10-8 ; finalement on l’emporte avec trois superbes derniers points. Quand on s’est rendu compte que c’était fini, on ne pouvait que se regarder et rigoler…

Ni : Pour moi, c’était avant les quarts de finale. Je me souviens m’être assise avec Sarah et lui avoir dit : « Nous avons vraiment une belle occasion. Ne pense pas que c’est trop difficile, on est capables de le faire ! Il faut que tu aies confiance en toi. Il faut juste jouer. » Réussir à la garder calme, améliorer sa confiance en son jeu et ses capacités, c’était mon travail de « maman » ! (Rires)

Sarah : Nous nous étions tellement entraînées. Notre coach Tommy nous a demandé d’arrêter l’entraînement, car il avait peur que nous soyons trop fatiguées pour le match! (Rires)

Ni : Sarah est jeune et a encore besoin de gagner en confiance et de croire en elle. C’est tellement important. La médaille, c’est une très grosse pression. Il faut un véritable courage pour aller la chercher. Je me souviens vraiment de ce moment, et le fait que ses résultats soient si bons aujourd’hui me fait chaud au cœur. Comme j’aime le dire, nous sommes pratiquement au sommet d’une montagne, et on peut dorénavant regarder avec plaisir tout le chemin parcouru.

La confiance fait-elle toute la différence ? Pouvoir se dire que oui, on l’a déjà fait, donc on en est capable enlève-t-il une grosse charge mentale ?

Sarah : Sans confiance, tu ne peux pas jouer à ton niveau réel. Mais c’est quelque chose qui s’entretient, qui vient petit à petit avec les résultats et les performances.

Ni : Complètement. Avoir confiance, mais aussi apprendre des performances passées, c’est capital. Que les matchs aient été gagnés ou perdus, il faut en retirer quelque chose.

Avec tous ces résultats, préférez-vous aujourd’hui jouer en simple ou en double ?

Sarah : Je préfère toujours le double, mais ça ne date pas des bons résultats. J’ai toujours adoré ça. Gagner en équipe, c’est un très beau sentiment, différent de la victoire lorsque l’on évolue en simple.

Ni : J’adore jouer en double. Pour moi, vu mon âge, je suis très heureuse qu’elle puisse m’aider ! (Rires) J’en ai besoin !

Le fait de jouer en équipe oblige-t-il à être plus focalisée, à moins lâcher un match ? On est d’une certaine manière responsable d’une autre personne…

Sarah : Absolument. Je sais que je suis responsable de moi-même, mais aussi de quelqu’un d’autre qui compte sur moi. Je ne peux pas me permettre de faillir. De plus, le fait de jouer à deux permet de communiquer, de se corriger et de s’entraider. C’est quelque chose de précieux. Le partenariat va au-delà des points joués, c’est vraiment un tout.

Ni : Oui, c’est certain. Toute seule, c’est parfois compliqué dans la tête. Il peut par exemple être très difficile de refaire une compétition en simple après une défaite en double. On est seule, et cela devient un défi d’oublier ce qui s’est passé et de se reconcentrer sur le match à suivre ou en cours.

Avez-vous encore en tête une ou des défaites particulièrement marquantes ?

Sarah : Bien sûr ! 

Ni : On a tellement de souvenirs… Ils restent toujours avec vous, et en particulier toutes les défaites ! (Rires) 

Avec votre niveau actuel et vos performances, pouvez-vous vous contenter du bronze ? N’y a-t-il pas un sentiment de tristesse quand on n’arrive pas à atteindre la finale ?

Ni : Bien sûr que quand tu perds la demi-finale, tu t’en veux et tu te dis que tu aurais pu faire mieux. Mais en sortant de la rencontre, on est conscientes de la performance réalisée.

Souffrez-vous d’un manque de crédibilité quand vous affrontez des adversaires qui voient que vous venez du « petit » Luxembourg ?

Ni : Les gens sont parfaitement conscients que nous sommes très fortes, et ils ne veulent pas nous affronter. Les résultats amènent forcément la crédibilité.

Sarah : Aujourd’hui, on voit bien en effet que tomber sur nous n’est pas du tout un bon tirage !

Y a-t-il des qualités que l’une a et que l’autre voudrait avoir ?

Ni : Pour moi c’est clair : son âge et son style ! (Rires)

Sarah : Moi, il y a beaucoup de choses que je veux d’elle ! (Rires) Je prendrais bien son cerveau, son expérience, sa manière d’aborder les matchs. Et sa passion, évidemment. 

Ni : Son état d’esprit et sa combativité sont aussi impressionnants. 

Quels sont encore les axes de progression de votre double ?

NI : On peut toujours s’améliorer. Notre technique est bonne, nos combinaisons aussi. Sur le plan tactique, la passion, l’état d’esprit, tout est OK. On manque peut-être parfois de stabilité. 

Sarah : La réussite aussi est à prendre en compte. Mais il est certain que l’on peut toujours s’améliorer.

Ni : Sarah peut encore aller très loin. Avec la stabilité, notre historique, notre connaissance, on est parmi les meilleures. Pour créer une telle équipe de double, il faut de nombreuses années de perfectionnement. 

Sarah : Le fait que nous ayons commencé si tôt joue en effet un rôle dans tout cela. 

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